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TélescoPages

Un espace dédié à la musique, à la littérature, à la science, à la conscience, et au-delà

Peter Wohlleben, Fred Bernard, Benjamin Flao - La vie secrète des arbres

J'ai la chance d'avoir des ami.e.s qui connaissent bien mes goûts. Pour mon anniversaire fin octobre, j'ai reçu une adaptation de La vie secrète des arbres en bande dessinée, le best-seller de 2015 de Peter Wohlleben. Un livre que je n'ai pas encore lu malgré tout le bien que j'en ai entendu. Comme souvent, les bandes dessinées de ma pile à livres passent entre les mains de mon fils, qui après une plongée de deux heures et du haut de ses 11 ans me l'a rendu en me disant que c'était un très bon livre. C'est donc sur sa recommandation que je m'y suis plongé à mon tour. Et je confirme que je partage complètement son avis!

Il me semble impossible de ressortir de cette lecture sans un regard différent sur le monde forestier, et plus largement, sur le monde végétal, qui nous entoure et dont je découvre qu'il se situe à des années-lumières de la vision utilitaire que nous en avons. Et pourtant, je suis très sensible à la cause écologiste, je m'intéresse beaucoup au monde animal, j'essaie d'avoir une vision aussi systémique que possible des interactions et des cycles qui constituent nos écosystèmes et sont les piliers du vivant, et j'ai eu la chance de profiter d'un grand jardin pendant mes jeunes années. Mais je n'imaginais pas un seul instant à quel point l'équilibre incroyable de l'écosystème forestier reposait sur des bases à ce point complexes, avancées, symbiotiques ! Je n'imaginais pas à quel point les arbres ont construit des interactions élaborées avec ce qui les entoure, notamment les champignons. Je ne réalisais pas qu'une forêt était pratiquement un organisme autonome doté de conscience où chaque espèce de l'écosystème a les fonctions d'un organe. De fait, en écho, je réalise à quel point la "gestion" des forêts (traduire "l'exploitation à l'échelle industrielle") sont une absurdité écologique et représentent sur le long terme un danger mortel pour une partie du vivant du fait de l'appauvrissement qu'elle constitue. Et je dois cette prise de conscience (comme des millions d'autres lecteurs) au travail d'une vie d'un seul homme: Peter Wohlleben. Un nom de famille qui se traduit pas "bien vivre", ça ne s'invente pas !

Nous avons tous plus ou moins des souvenirs forts associés à un arbre. Lorsque j'étais enfant, je passais mon temps à grimper dans tous les oliviers du jardin, ou sur les branches perchées du grand olivier de la MJC, éprouvant le délicieux frisson du danger réel de la chute. Je dois à un arbre par exemple le fait de ne pas avoir chuté de 10 mètres lorsqu'un "camarade" m'a poussé dans le dos en bord de falaise. J'ai eu la chance de pouvoir comparer ma croissance à celle d'un pamplemoussier que mes parents avaient planté dans le jardin (et dans mon coeur) quand j'avais 2 ans jusqu'à ce que celui-ci soit fauché par la vague de froid de 1985. Je repense à ce marronnier dont j'adorais ramasser les capsules pour en sortir les fascinantes graines brillantes et lourdes. Et ce néflier à l'entrée de ma maison dont j'étais manifestement le seul à apprécier les fruits chaque année ? Ou encore ce cerisier où j'observais les mulots faire des provisions depuis la fenêtre de la cuisine. Et cet autre cerisier que j'ai planté moi-même et dont j'ai connu le bonheur de déguster les tout premiers fruits. Je suis persuadé que les enfants ayant grandi dans un environnement avec des arbres ont conservé un rapport organique aux arbres, même s'ils l'ont un peu oublié avec le temps. Mais combien réalisent ce qui se trame derrière cette magie si accessible qu'elle pourrait en paraître banale et insignifiante ?

Cette bande dessinée est littéralement truffée d'informations émerveillantes et c'est justement ce qui, je crois, en fait la saveur et le succès. Avec des termes et des images qui vont du plus simple au plus élaboré, elle réveille une part d'enfance, et provoque l'enchantement, une sensation dont nous avons malheureusement bien trop appris à nous passer avec le temps. La pédagogie est partout, tout en douceur et en bienveillance. L'amour de l'auteur - ingénieur forestier qui a pris le risque un jour de quitter la fonction publique et l'administration des forêts bien trop irrespectueuse de l'équilibre précaire de ce qu'elle est censé protéger - pour la forêt et pour la nature incroyable qui en sous-tend la vie transpirent à chaque page. C'est porté par le plaisir de la lecture, par la beauté des images (bravo aux dessinateurs et illustrateurs Fred Bernard et Benjamin Flao !), que l'apprentissage se fait. Deux heures pour changer un regard, rarement un investissement en temps n'aura été aussi profitable ! J'y retrouve un peu des ingrédients qui ont fait le succès de Un monde sans fin, des arguments, des analogies accessibles et surtout de la science à chaque page. Un livre qui a le pouvoir de changer notre rapport au vivant et dont j'ai pu constater qu'il intéresse aussi bien les enfants que les adultes, ce qui est une raison suffisante pour l'offrir ou l'emprunter à la bibliothèque.

 

Peter Wohlleben, Fred Bernard, Benjamin Flao - La vie secrète des arbres
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