Une nouvelle lecture, toujours dans le domaine des expériences de mort imminente: Mon bref passage dans l'autre monde a la particularité d'avoir été écrit par une ingénieure matériaux, qui a travaillé 14 ans pour EDF dans le domaine du nucléaire. En 2004, l'auteure fait un malaise cardiaque à son travail qui donne lieu à une EMI où elle rencontre des êtres de lumière et vit l'expérience de l'amour inconditionnel, un amour qu'elle qualifie de dépassant toutes les formes d'amour terrestre. Cette expérience va bouleverser sa vie et l'orienter peu à peu dans l'humain, en même temps que des "bizarreries" vont s'inviter dans son quotidien, sous forme de signes, d'expériences fortes, de rencontres et de synchronicités. Gardant d'abord le récit de cette expérience pour elle, elle finit par se confier à une collègue en qui elle a confiance. Celle-ci lui conseille d'en parler à son grand-père qui se révèle n'être autre que Rémy Chauvin, professeur à la Sorbonne, référence mondiale en éthologie et ayant un intérêt certain pour la parapsychologie puisqu'il a publié plusieurs livres à ce sujet.
En 2007, elle retombe gravement malade, et est hospitalisée pour une maladie qui ne peut pas être identifiée, après que les hypothèses de l'AVC et de la sclérose en plaque ont été envisagées. Elle prend peur et en même temps décide d'accepter de remettre son destin entre les mains des "forces supérieures" qu'elle a rencontrées lors de son EMI. Dès le lendemain, elle va mieux et c'est un long processus de guérison qui s'enclenche. Désormais, elle ne croit plus, elle a la foi. Sa mère lui apprend alors que sa grand-mère maternelle avait vécu une expérience similaire au même âge qu'elle, qui l'avait clouée sur un fauteuil roulant pour le reste de sa vie. Est-ce du ressort de la psychogénéalogie ? Elle ne le saura pas.
Après avoir créé une association de secourisme, elle est amenée à sauver un motard en arrêt cardiaque et respiratoire, non loin de la centrale de Flamanville où elle doit se rendre pour une réunion. Ses premiers gestes de secours n'ayant aucun effet, en attendant les secours, elle s'en remet de nouveau aux forces supérieures, persuadée que le blessé peut la voir et connaître ses pensées. Quelques secondes après, le blessé respire de nouveau et son coeur repart. Les secours arrivent, le prennent en charge. Il restera dans le coma plusieurs mois et elle se fera une amie de la femme de ce motard.
En 2014, elle prend conscience de ne plus être à sa place dans le nucléaire, d'être déconnectée de sa nature profonde et entame une reconversion dans la sophrologie. Elle quitte alors son poste confortable financièrement d'ingénieure pour se lancer en praticienne indépendante. À partir de là, il n'y aura pas de retour en arrière.
J'ai été attiré par cet ouvrage suite à une conférence de 2018 visionnées sur YouTube, 100% femmes, sur les phénomènes de conscience. Ingénieur moi-même, avec deux ans de sciences-physiques dans les pattes et 3 ans en informatique, ayant vécu un phénomène du même type qu'elle il y a une bonne vingtaine d'années (largement moins spectaculaire cela dit), j'étais très intéressé d'avoir un regard de scientifique sur une expérience de ce type. Le livre m'a un peu laissé sur ma faim dans le sens qu'il est clair que l'auteure ne semble pas trop intéressée par les mécanismes en jeu, qu'elle ne s'inquiète pas outre mesure des biais cognitifs qu'il me semble identifier avec mes yeux de lecteur. Elle n'est pas là pour prouver quoi que ce soit, simplement pour témoigner. En ce sens, ce n'est pas la scientifique qui parle, même si la mécanique quantique est abordée, mais l'être humain ayant vécu une expérience subjective marquante.
Ce récit vient donc s'ajouter aux nombreux ouvrages existants écrits à la première personne, comme ceux d'Eben Alexander, neurochirurgien du cerveau à la Harvard Medical School. Ces phénomènes sont très difficiles à étudier d'un point de vue scientifique, parce qu'ils ne se produisent pas sur commande, et même les scientifiques de formation qui les vivent calent devant le mur de la subjectivité. Néanmoins, la science a besoin de témoignages anecdotiques, pour établir un corpus à étudier, poser des hypothèses de travail, et surtout pour contribuer à faire tomber la barrière de la stigmatisation qui crée une auto-censure bien réelle dans le monde scientifique. Heureusement, comme l'annexe du Manifeste pour une science post-matérialiste du Dr Mario Beauregard inclus dans ce livre le montre, les lignes sont en train de sensiblement bouger, les nouvelles générations de chercheurs semblent plus ouvertes à l'étude de ces phénomènes de conscience. Peut-être les années qui viennent verront enfin la "question difficile" étudiée sous un angle différent, cela me semble souhaitable en tous les cas.