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TélescoPages

Un espace dédié à la musique, à la littérature, à la science, à la conscience, et au-delà

Hamid Ben - Alborada

Hamid Ben est un poète que j'ai découvert sur les réseaux sociaux et dont la plume me touche suffisamment pour que j'aie envie de le lire au format livre. Une amie m'a ainsi offert le dernier né de l'auteur: Alborada, publié en décembre 2023. Si je retrouve la touche classique, le caractère contemplatif et l'érudition de ses poésies numériques, je n'y retrouve pas en revanche le supplément d'âme que j'y attendais, et que j'attends de la poésie de façon générale. J'attends des fulgurances, de la surprise, un souffle et une inspiration venues d'ailleurs (accord en genre de proximité assumé). Certes, les mots sont beaux, élégants, choisis avec délicatesse; ce sont des mots de courtoisie, des mots portés comme un voile de pudeur sur le désir et la sensualité qui habitent l'auteur; des mots comme de l'eau sur un incendie. Peut-être ne suis-je pas tant touché parce que ces mots qui pourraient être d'amour à l'égard d'une femme en particulier me semblent adressés à une version toute en abstraction et idéalisée de la femme en général ? Quoi qu'il en soit, avec le temps, je fais le constat que l'écriture romantique ne résonne pas beaucoup en moi et sans doute ne dois-je pas chercher plus loin.

Alborada nous parle du temps d'avant la rencontre, ce temps où le désir se forge au feu de la distance et n'a été ni consommé, ni consumé. "La braise est en nous, tes vents l'attisent indubitablement." Mot espagnol qui signifie à la fois "aube" et "aubade". Et Hamid Ben joue beaucoup de ce double sens. "Ce qui ne s'écrit ce matin, ne s'écrira jamais". Il y est question des nuits plus belles que les jours, de nuits pourvoyeuses de tous les possibles, de l'aube ressac qui efface, de l'aube qui renouvelle, de femmes rédemptrices qui se contemplent comme un parterre de fleurs et à qui l'on adresse l'aubade en usant du tutoiement de celui qui lit dans les âmes. Mais il y est aussi question en creux d'un enfermement, de visions fugitives à travers l'encadrement d'une fenêtre, de murs, d'océans qui séparent, de la pesanteur terrestre qui rend les étoiles intouchables, d'un rêve qui se rêve en plongeant dans les yeux d'une autre., de la beauté qui se dissipe comme les brumes d'un rêve Je pense soudain à la merveilleuse fille d'Ipanema que Tom Jobim regarde mais qu'elle ne voit pas. Alborada est une liberté octroyée par l'écriture poétique. Car même enfermés dans un livre, les mots voyagent de coeur en coeur.

C'est sans doute parce que je fais une différence entre l'amour, et l'amour de l'amour, que je n'ai pas été aussi touché que je l'espérais. L'amour est transcendance; l'amour de l'amour repose quant à lui sur le désir mais survit rarement à l'expérience. L'amour reste vivant bien après l'aube; l'amour de l'amour est un phénix qui exige la nouveauté à chaque aube pour renaître de ses cendres. L'amour est un feu qui alchimise; l'amour de l'amour est un feu qui brûle les ailes des papillons. L'amour est l'essence de la vie; l'amour de l'amour est seulement un rêve qui ne survit pas à l'aube. L'amour est une quête; l'amour de l'amour, une fuite.

L'amour, c'est ce qui se passe quand se referment les contes de fées, quand les humains brûlent leur costume de princesse et de prince, et qu'ils découvrent que le bonheur n'est pas acquis passé le premier baiser et la première nuit, se gagne à travers l'érosion du quotidien. Certes, les rosiers, lys, arums et jasmin en fleur sont des splendeurs pour les sens qui méritent d'être célébrées pour aucune autre raison que l'offrande de leur sensorialité, mais l'amour se cultive en amont et en aval de la floraison.

C'est peut-être parce que le très bien écrit Alborada met l'accent sur la floraison que je n'ai pas réussi à y adhérer au-delà de la forme et de l'esthétique.

Hamid Ben - Alborada
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