Un espace dédié à la musique, à la littérature, à la science, à la conscience, et au-delà
27 Octobre 2024
La poésie a ceci de supérieur aux autres modes de communication qu'elle est une luminescence composée de mots. Et cette lumière qui s'entrevoit à travers des mots qui s'entrechoquent forme les contours d'une photographie vibratile, unique, reconnaissable entre mille. Comme l'odeur d'un enfant, comme l'odeur de sainteté, comme l'odeur d'avant les humeurs. C'est cette lumière originelle que je recherche, qui s'offre à ricocher, de toi à moi, de moi à qui pourra ou qui voudra. Cette lumière qui est encore toi mais qui est déjà un peu moi puisqu'elle s'est déposée sur l'écran de ma conscience et qu'elle commence à pousser en moi. A pousser les murs surtout, les murs du carcan, les murs de l'ego qui protège mais qui enferme. Cette nuit, je l'ai passée avec une poétesse que je n'avais pas lue depuis longtemps et dont j'ai reconnu la vibration. Myriam Ould-Hamouda. Qui s'offre en matriochka, multiple, kaléidoscopale, tantôt femme, tantôt enfant, tantôt en souffrance, tantôt radieuse, toujours observatrice des émotions qui passent incognito, fugitivement sur les visages et les corps battus par les vents. Toujours lumineuse. Toujours avec ces mots du quotidien, ces mots actuels, et même avec ces mots technologiques dont on sait qu'ils n'auront qu'un temps mais qu'on emprunte quand même avant l'obsolescence.
En mode avion. Quand la connexion à l'extérieur est coupée volontairement. Quand il ne faut plus faire qu'avec les programmes qui sont déjà installés et qui parfois occupent notre disque dur inutilement, ces programmes dont le loisir nous est offert de les désinstaller. Pour faire de la place. Pour s'alléger. Pour s'offrir la possibilité d'un autre quand la connexion sera rétablie.
En mode avion. Pour se reconnecter à soi, se sortir de la frénésie d'un monde fonctionnel aux interactions d'artifice et pour voir à quel point on n'est pas si rien finalement. Pour jouer avec ses pleins et ses déliés, et reprendre contact avec un corps émotionnel qui en a pris des uppercuts. Pour reprendre possession de ses moyens en se dépossédant de soi. Pour habiter de nouveau sa propre peau en se familiarisant avec ses fantômes oubliés.
En mode avion. Pour faire le point en le mettant sur les i. Pour mettre la barre sur les t mais surtout plus haut parce qu'on le mérite, merde ! Pour tirer un trait sur les abus, sur ces autres avec qui l'on s'est sentie plus seule que jamais, sur ces agresseurs qu'on a laissé entrer dans la cathédrale de nos corps jusqu'à l'auto-sabotage, jusqu'à l'auto-perversion narcissique, jusqu'à se figurer grenade dégoupillée dans un ultime sursaut de désespoir, de self-défense. Pour se pardonner d'être aussi peu prête.
En mode avion est un hommage rendu à la vie qui est là, surtout quand on ne la voit plus. C'est une invitation à retrouver son chemin en prenant la main que l'enfant intérieur nous tend. C'est une poésie balsamique, réparatrice, dense, simple et complexe à la fois, comme le monde d'en haut ou le parc d'en bas. C'est un éloge de la lenteur, des chemins qui cheminent, de la douceur qui enveloppe, et de la nudité de l'être qui est sans n'être rien de plus, qui est sans avoir.
En mode avion est un recueil poétique de Myriam Ould-Hamouda paru en octobre 2024 aux éditions des Carnets du dessert de Lune. Et c'est avec une joie authentique que je m'y suis plongé, en remerciant ma soeur d'atelier d'écriture qui a eu le bon goût de m'en offrir un exemplaire dédicacé par son auteure.
En mode avion - Les Carnets du Dessert de Lune
Myriam OH tente de s'extraire de l'incessant défilé des images creuses de l'époque contemporaine et invite à tenir debout dans un monde qui s'écroule.
https://dessertdelune.com/boutique/pleine-lune/en-mode-avion/